L’écriture
Comment améliorer son écriture par la lecture ?

C’est en lisant qu’on devient écrivain.
1) Parce que lorsqu’on écrit il faut avoir en tête un standard de référence.
C’est en forgeant qu’on devient forgeron. C’est par la pratique qu’on s’initie aux règles de l’écriture, et surtout qu’on s’expose aux talents de la littérature. Comment progresser si l’on n’a pas de référence voire de réfèrent.
Un apprenti pâtissier qui ne goûterait jamais de gâteaux, a peu de chances de s’exposer au savoir faire de ses congénères, peu de chance de connaître les bons alliages et les nouvelles saveurs, peu de chances de découvrir les subtilités des modes de cuisson…Et beaucoup de chances de redécouvrir la roue : le beurre, la crème et le chocolat, c’est bon. En bref il aura à redécouvrir ce qui l’a déjà été : les acquis.
Concrètement, les auteurs qui ne lisent pas auront à perdre beaucoup de temps pour accéder à un standard déjà acquis par nombre d’écrivains. Dans tous les domaines artistiques et culturels, il faut se nourrir du travail de ses pairs, ne serait ce que pour se repérer soi même par rapport à un étalon.
2) Parce que tout écrivain doit rester modeste.
Il y a eu Shakespeare, Molière, Zola, Voltaire, Proust, Baudelaire, Cervantès, Goethe, Gogol, Dante et vous.
Goûter aux grands écrivains, c’est prendre une grande leçon d’humilité. Pas une humilité qui doit vous inhiber, mais une humilité qui doit renforcer le niveau d’exigence que vous vous imposez, et qui doit aussi vous aider à mesurer la quantité de travail à fournir pour les atteindre.
Si vous avez des difficultés à lire, entrez par un genre littéraire qui vous séduit.
Policier, Fantasy, Poésie, Jeunesse, roman… selon votre sensibilité, vous découvrirez à travers votre genre de prédilection la relation particulière entre la lecture et l’écriture…
Le « devoir » qui consiste à lire les « grands classiques » peut au contraire devenir un « mur » qui vous éloignera pour longtemps du goût de la lecture.
Contribuer à un genre littéraire qui vous sied, est certainement un moteur, un déclencheur pour fixer vos standards d’écriture et d’exigence. Car ce que vous lisez, vous devez avoir envie de le lire. Lire sans plaisir et sans vibration est contreproductif. Car c’est la passion qui anime, et sortir d’un livre qui vous a fait de vous » un autre » est le moyen le plus sûr d’élever son niveau et de progresser.
3) Parce qu’il faut lire pour savoir ce qu’aiment les lecteurs
Ah oui, adieu les puristes, sauf si vous écrivez pour vous même (soyez clair), vous écrivez pour être lu.
Il faut lire, mais il faut lire activement. Si vous écrivez dans un genre littéraire bien précis, les lecteurs attendront une série de codes propres au genre littéraire que vous aurez élu, sauf si vous êtes un génie (et dans ce cas, cet article est inutile), mais les accidents sont rares.
Mais plus encore, il faut connaître la littérature porteuse de ventes. Goncourt, Renaudot, Médicis et les quelques Best-sellers qui font tourner le commerce du livre. Et ne vous enfermez pas dans une tour d’ivoire, il faut aller au lecteur, connaître ses goûts, le comprendre. Votre volonté d’écrire, si elle ne tient pas qu’à des raisons propres à vous consiste à rencontrer le lecteur et le séduire.
La conscience de la lecture : pour un écrivain, lire est important mais savoir lire est essentiel
En tant qu’écrivain ou écrivant. La valeur d’attention à ses lectures doit être supérieure à celle d’un lecteur lambda. Certes, il faut se laisser prendre par le plaisir de lire, mais il faut aussi savoir « apprécier sa lecture, l’évaluer »
Savoir s’arrêter, faire une pause, relire, revenir sur un passage. Découvrir et comprendre ce qui nous plait, ce qui nous émeut. Le style, le ton, les personnages, l’intrigue, le rythme.
La lecture attentive permet l’appréhension des techniques de construction narrative, la compréhension des niveaux de lecture. Car les bons écrits portent souvent en eux une part d’ambiguïté : analyser, s’inspirer, transposer ou au contraire s’éloigner, garder en mémoire. Mais avant tout comprendre ce qui vous plaît et ce qui ne vous plaît pas…
Plus cérébral, la structure du livre dans son entier doit être évaluée. En particulier le phénomène de cohésion de tout ce qui compose le livre (personnages, rythme, style, syntaxe, dialogue). Comprendre en quoi cette cohésion nous plait, en quoi elle est aspirante. En quoi elle a peut avoir une influence sur votre travail et votre identité d’auteur.
En bref : quand vous écrivez, votre lecture de plaisir doit aussi être une lecture analytique, une lecture consciente qui s’inscrit dans la compréhension d’un mouvement, d’un esprit, d’un courant. Tout simplement pour comprendre quel type d’auteur vous êtes et ou réside votre talent.
Car votre capacité à écrire naît de vos lectures. Elles vous tendent un miroir.
Mais attention : prendre en référence ne veut pas dire plagier ou copier
Pas dans l’emprunt d’un style : car le style, c’est cela qui définira définitivement votre patte d’auteur et c’est votre tampon, votre signature.
Mais attention, le style s’impose à force d’écrire. C’est la pratique de l’écriture qui le forgera. Dans ce cadre, la notion de temps, d’expérience est essentielle. Et votre personnalité n’apparaîtra qu’au fil d’une pratique assidue.
La fusion lecture / écriture : une technique pratiquée dans les Universités américaines. Le but : trouver un héros d’écriture auquel se référer.
Tout comme la lecture, l’écriture se pratique seul. Et cette solitude sans baromètre peut conduire à des dérives. D’abord celle de ne plus avoir de regard sur votre travail, puis celle d’évoluer dans l’inconnu sans une présence qui vous soutient dans la dynamique de l’écriture.
Les méthodes américaines, toutes critiquables qu’elles soient, ont le mérite d’exister et de fonctionner pour nombre d’entre nous. Celle ci consiste à prendre un auteur réfèrent naturel. Cela peut soutenir moralement un écrivain en phase de travail et lui permettre de formaliser concrètement ses objectifs par une comparaison permanente (un benchmark) entre son travail et l’auteur auquel il se réfère.
Ce réfèrent qu’on considère comme un « auteur/ tuteur » , (choisi parmi l’un de vos auteurs favoris) donnera à l’auteur le sentiment d’être accompagné dans son acte d’écriture et surtout de modéliser concrètement son texte avec des exemples.
Comment cet auteur a t’il réussi à rendre ce « non événement » intéressant ? Comment est-il parvenu à donner de la densité à ses personnages ? Pourquoi fait-il passer 10 ans en une page, et un mois en 100 pages ? Pourquoi cette longue description n’est-elle pas ennuyeuse ?
Cela vous permettra à la fois d’avoir un modèle (que vous admirez) et un standard auquel se confronter.
Car peut être qu’en littérature, comme en gastronomie, nous sommes ce que nous lisons.
Mais le statut d’écrivain consiste t’il uniquement à avoir lu ce qui est important. Il ne faut pas bien sûr que l’on lise avec comme unique objectif d’en tirer des qualités de style et de structure pour sa propre écriture ? Dans ce cas comment la lecture interfère t’-elle exactement au moment de la conception d’un texte ? Et à quel stade ? Sans doute l’inconscient joue t’il un rôle ?
Et la pratique de l’écriture assidue est peut être le seul moment d’éveil à cette connaissance et référence à ce que nous avons lu. Dans ce cas, l’écriture serait elle même un stimulant pour l’écriture et son optimisation. Tout est une question de dosage.
La lecture ou les lectures doivent s’inscrire dans ce que vous attendez de votre écriture. Vos ambitions, vos objectifs.
Qu’il s’agisse d’écrire vos souvenirs de famille, un drame personnel, un essai philosophique, un roman, les exigences de lecture diffèreront et devront s’orienter le genre littéraire de prédilection.
En résumé pourquoi lire quand vous écrivez :
1-Pour avoir des standards de référence : mieux vaut avoir lu Verlaine si vous pensez avoir la plume d’un poète.
2- Pour maitriser les techniques narratives, la qualité de structure d’un roman si vous vous sentez romancier.
3- Pour s’appuyer sur des techniques éprouvées : construction d’un personnage, utilité et fluidité des dialogues, si vous cherchez la justesse et l’équilibre de vos écrits.
4- Pour comprendre la « vastitude » de l’imagination et de l’univers des auteurs. Tout cela pour aérer l’esprit et oxygéner vos recherches et votre imagination, sortir d’un milieu restreint et étriqué. (argument à débattre)
5- Pour maîtriser l’art de l’intrigue.
Dans ce cadre, toutes les lectures de tous les genres littéraires sont utiles. Même les mauvaises, elles vous apprendront elles aussi à détecter ce qu’il ne faut pas faire