Quand Oran
Posté par khalfi1 le 29 août 2010
Histoires oranaises
Quand Oran n’était qu’une petite plage
Les géographes et chroniqueurs du XIe siècle, comme El Idrissi, El Bekri, et plus tard l’Andalou Hassan El-Ouazzan (Léon l’Africain), rapportent que le site primitif d’Oran est une petite plage où les bateaux pouvaient être tirés, le soir, sur le rivage, non loin d’un ravin arrosé de façon permanente en eau douce, susceptible d’alimenter une faible population et des jardins potagers.
Dans ses travaux de recherche, le Dr Saddek Benkada, un historien émérite de la ville d’Oran, signale qu’il n’y avait pas de port mais une petite plage avec un mauvais débarcadère. Les navires qui ravitaillaient la ville s’abritaient sous le fort de Mers El-Kebir. Pour être plus précis, l’ensemble se composait de la mer et d’une plage, de la montagne dominante, d’un plateau encadré par deux ravins : Ras El-Aïn, à l’ouest, le Ravin Blanc à l’est, d’un arrière-pays immédiat, de larges plateformes étagées, coupées de ravins et faciles à gravir. Cette position est située à un carrefour de routes de terre, venant de l’ouest par la rive nord de la Grande Sebkha, du centre (Mascara) par les vallées convergentes de Oued Sig et Oued Habra, et de l’est du plateau mostaganémois par le pied du Sahel d’Arzew et la baie de la Macta, nous rappellent ces mêmes sources.
Ce concours de voies terrestres très faciles est resté très important dans un pied du Sahel où la circulation était uniquement pédestre et équestre, jusqu’à l’orée du 19e siècle, où les populations furent très mobiles à cause de différents facteurs liés aux émigrations politiques, aux migrations saisonnières, aux invasions venues de la mer, comme du continent. La présence de matériaux les plus divers offrait des possibilités de construction, comme la pierre à bâtir à partir du calcaire ou du tuf, faciles à tailler, de l’argile susceptible de fournir des briques et des tuiles qu’on trouvait à Mers El-Kebir et à Aghbal, est-il relevé dans les documents de la Société de géographie et d’archéologie de la province d’Oran. Il y a aussi le bois du maquis qui couvrait le djebel Murdjadjo et le massif de djebel Ak’har (montagne des Lions).
L’attention des romains
Ces zones fournissaient des perches de Thuya, un bois imputrescible pour les poutres des terrasses et du diss, pour la couverture légère des toits. «Le cadre naturel -mer, montagne, plateau, maquis- n’est pas sans beauté et sans variété : le spectacle des yeux aidait au choix du site urbain», signalait Robert Tinthoin, géographe, ancien membre de cette société savante, dans une étude consacrée au «Peuplement musulman d’Oran». Cependant, il y a lieu de rappeler que l’agglomération oranaise n’entre dans l’histoire écrite qu’au 10e siècle, quand elle fut fondée (902-903) par des marins andalous, alliés à des tribus locales semi-nomades. Bien qu’aucun document épigraphique ne le confirme, le site d’Oran se compose de sa colline, son «Accra» du pic d’El-Haïdour -poste de surveillance merveilleux et de correspondance par feu, du cap Falcon à la pointe de l’Aiguille, d’Est en Ouest- et de sa petite plage, au débouché du ravin de Ras El-Aïn où marins puniques, à l’image des célèbres raïs Dali Mami ou Kheireddine Baba Arroudj (Barberousse) trouvaient abri et escale, comme le font prévaloir les recherches archéologiques sur la côte occidentale plus sauvage.
A une époque plus lointaine, les criques du port de Mers El-Kebir, mieux abritées, avaient attiré l’attention des Romains, sous le nom de Portus Divini (Port divin), par rapport à Portus Magnus (Grand port) de Bethioua. Les matériaux anciens qui gisent encore sous les constructions urbaines actuelles témoignent de l’ancienneté de l’occupation humaine dans cette zone portuaire. De fait, si le port de Mers El-Kebir a conservé sa fonction durant des siècles, grâce à sa protection naturelle contre les vents, la vocation portuaire d’Oran s’est effacée durant une longue période. Après sa fondation au 11e siècle, Oran a connu, il est vrai, une période de lustre aux 13e et 14e siècles, comme organisme officiel du royaume de Tlemcen, avec une population, considérable pour l’époque, de 25 000 habitants, en liaison avec le port de Mers El-Kebir et en relation avec l’Espagne, Gênes, Venise, Pise (Italie) et Marseille (France).
Sous l’occupation espagnole (1509-1792) – simple Presidio – avec la position maritime de Mers El Kebir, Oran fut à la fois garnison militaire, bagne, poste puissamment fortifié, petite cité de marchands, de couvents et d’églises, de 3 000 habitants. Elle dut son importance à sa position, face à Carthagène (Espagne), fermant la Méditerranée occidentale aux incursions de corsaires de la Régence d’Alger, comme les célèbres et puissants Raïs Dali Mami ou Khireddine Baba-Arroudj, devenus les maîtres de la course en haute mer pour barrer la route et s’emparer du butin et des richesses que transportaient les voiliers de commerce des puissances européennes. Oran est devenue cité ottomane de 1708 à 1732, quand elle fut libérée par Bey Bouchelaghem et de 1792, lorsque le bey Mohamed El-Kebir mit fin à l’occupation espagnole, jusqu’au mois de janvier 1831, date du débarquement du corps expéditionnaire français dans la ville sans que le Bey Hassan, le dernier représentant de la Sublime Porte, opposa de la résistance.
Journal El-Watan
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